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Peut-on faire de la bio sans être équitable ?

Filières

22 décembre 2020
Peut-on faire de la bio sans être équitable ? 1386 1040 Good Fabric

Désormais, dans la mode et l’habillement, tout le monde ou presque veut faire du « durable ». Le problème avec ces mots génériques, c’est qu’on peut y met tout et n’importe quoi.

Ce mouvement irréversible qui s’est engagé est une excellente nouvelle, sauf si la finalité de certaines marques ou enseignes est de faire du bio sans rien changer, c’est-à-dire en continuant à s’accaparer l’essentiel de la création de valeur.

Développer une marque et des magasins est un métier très difficile, j’en sais quelque chose, et particulièrement par les temps qui courent. Il faut faire de la marge pour tout payer, en espérant qu’il en reste un peu à la fin de la saison. Mais ce n’est pas une raison pour marcher sur ses fournisseurs.

Un coton-culteur indien en conventionnel croule sous les dettes et s’empoisonne aux pesticides. Un coton-culteur en bio va d’abord perdre en rendement car il faut apprendre de nouvelles méthodes et redonner vie à la terre. Ensuite si tout va bien, il pourra vivre de son travail et permettre à ses enfants d’aller à l’école. Le « si tout va bien », c’est quand il a la chance de faire partie d’une bonne coopérative qui lui apporte tout le soutien, la formation nécessaire et qui lui vend (ou lui donne) les bonnes graines non-OGM. Si « tout va bien », il pourra vendre son coton au prix premium. Mais pour cela, il faut des acheteurs qui acceptent de payer ce prix premium…

Le « premium », c’est simplement vendre le fruit de son (dur) travail au prix juste. Ce prix juste lui permet de vivre un peu plus décemment. Beaucoup d’acheteurs aujourd’hui veulent le certificat GOTS, mais la plupart continue à appliquer la même logique qu’avant et réclamer les prix intenables du conventionnel. Pour rependre les mots de Sebastien Kopp, cofondateur de Veja dans l’article du magazine So Good, « on peut faire du bio et être un vrai connard ».

Vouloir revendiquer des valeurs suppose de les défendre pleinement et d’assumer ses responsabilités. Le prix d’un kilo de coton bio/équitable se situe autour de 30% au-dessus d’un coton conventionnel. Mais l’impact sur le prix du produit fini n’est que de l’ordre de 3 à 5%. Dans ces conditions, comment peut on vouloir acheter un produit en coton biologique certifié GOTS tout en refusant de payer le prix équitable aux petits producteurs ?

La responsabilité des marques est de s’assurer que les personnes qui travaillent sur leurs chaines de fabrication travaillent en sécurité, vivent dans des conditions décentes et soient rémunérées en cohérence avec la qualité et la quantité du travail fourni.

Le fait de ne pas accepter de payer le prix premium menace tout simplement l’existence même de la production de coton certifié biologique produit conformément au référentiel GOTS.

La responsabilité des acheteurs devrait consister à soutenir ses producteurs qui prennent des risques pour leur propre survie et pour proposer un coton pur et sain, car c’est leur intérêt. Mais pour cela, encore faut-il se préoccuper de leur existence.

NOUS SOMMES TOUS IMPLIQUES

Cette notion de prix juste s’applique à tous les acteurs de la chaine mais aussi évidemment aux consommateurs. Il est très facile de porter des valeurs mais il est plus difficile d’agir en cohérence avec ces mêmes valeurs. De même qu’il n’est pas concevable de vouloir faire des collections durables en imposant des conditions d’achat insoutenables à ses fournisseurs avec les répercussions induites et immédiates sur l’ensemble de la filière.

Donc s’engager dans l’éco-conception implique nécessairement d’associer protection de l’environnement et de l’humain (l’un ne va pas sans l’autre)… En conséquence, pour que tout cela puisse fonctionner et permettre à son entreprise de préserver sa rentabilité, il est indispensable de revoir son business model dans sa globalité.

REPENSER LES BUSINESS MODELS

Continuer à vouloir maximiser la marge brute au détriment de ses fournisseurs pour vendre l’essentiel de ses produits en solde est incompatible avec la création de collections « eco responsables » et de bâtir une entreprise solide et rentable sur le long terme.

Repenser son business model ne signifie pas, à l’inverse, vouloir perdre de l’argent. Certains détracteurs voudraient nous faire croire que les entreprises engagées seraient systématiquement mal gérées ou destinées à perdre de l’argent (pour justifier de ne rien changer ?). Au contraire, ces entreprises qui se sont imposées des contraintes que les autres n’ont pas et qui se développent malgré tout, démontrent la pertinence de leur vision et de leur modèle.

Il existe de nombreuses sources d’optimisation dans beaucoup d’entreprises qui pourraient leur permettre de changer. Mais cela suppose de prendre le temps d’une profonde réflexion sur sa raison d’être et sa capacité de répondre aux nouvelles attentes de ses clients. Et c’est au prix d’efforts importants que le changement à tous les étages sera possible. Mais plutôt que d’efforts, il est plus judicieux de parler de partage d’une vision porteuse de sens. Et alors tout est possible.

Il y a quelques années, beaucoup hésitaient à se pencher sur le sujet du développement durable, ou tout simplement n’y croyaient pas. Mais aujourd’hui, est-il encore possible de se mettre la tête dans le sable ? Les dinosaures vont-ils réussir à se réinventer pour survivre ?

Le contexte actuel ne simplifie pas la donne, certes. Mais nous ne pouvons pas nous en servir comme excuse, car seul les meilleurs d’entre nous sortiront de cette tempête et profiterons du rebond.

L’HONNETETE ÇA PAIE !

J’ai la faiblesse de croire que l’honnêteté est un atout. A l’heure où les clients veulent tout savoir, il est de plus en plus risqué de cacher la réalité. Evidemment si on cache la façon dont on fabrique ses vêtements, c’est souvent pour une bonne raison : bien souvent on n’en a aucune idée !

La chaine est complexe et les certificats sociaux et environnementaux (quand les usines en ont) ne sont pas suffisants pour être vraiment sûrs que tout est conforme à nos attentes. Alors comment fait-on ?

Les méthodes du passé importent moins que l’action du présent. Ainsi, même si vos produits ne sont pas éco-conçus et les chaines de fabrication manquent de transparence, l’important est d’engager les actions pour améliorer les choses pas à pas et de manière significative. Un work in progress sur le long terme. Alors vos clients ne vous tiendront pas rigueur du passé et accepterons de vous faire confiance même si vous n’êtes pas parfait (personne ne l’est). A condition de leur apporter des preuves, des vraies.

Pour conclure, si vous prenez des engagements ou que vous cherchez seulement à « verdir la façade » sans vous préoccuper du reste, mieux vaut ne pas se faire prendre par la patrouille; car il n’est pas sûr, cette fois, que vos clients vous le pardonnent le jour où ils sauront.

Par Louis-Marie VAUTIER
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