Good Stories

L’histoire du coton / volet 2

Filières

15 juillet 2021
L’histoire du coton / volet 2 1386 915 Good Fabric

Volet n°2 : Une croissance sans fin au détriment de l’humain

A la fin du 17-ème siècle, toutes les classes sociales utilisent le coton, il a donc fallu produire toujours plus et plus vite. Pour répondre à l’augmentation de production, des machines ont été inventées et la révolution industrielle est née. Mais quel a été le coût social de cette révolution ?

Du côté de l’Europe, juste avant la révolution industrielle, les tisserands habitent en campagne et travaillent en famille dans leurs propres maisons. Le travail de ces ouvriers suit le schéma de la famille : les enfants préparent le coton, la femme file et l’homme tisse. La matière première est apportée par le marchand et quand il n’y a pas de commande, on va cultiver le champ.

Les inventions se succèdent et développent énormément le secteur cotonnier. Ce développement apporte une quantité de travail importante. Les tisserands deviennent obsolètes, ils sont obligés de changer de qualification et doivent renoncer à leur liberté. Ils vont devoir travailler un nombre d’heures considérable en se pliant à une rigide discipline. On constate les premières conséquences sociales dans les premières filatures. Les fileuses, qui œuvraient dans la campagne, sont obligées de travailler dans les usines avec leurs enfants. Cette main d’œuvre non qualifiée est misérablement payée. Les journées de travail comptaient treize à quatorze heures. Cependant, cette situation ne dure pas, les hommes plus productifs que les femmes et les enfants, vont les remplacer. Les enfants restent travailler à l’usine pour aider au besoin.

Les conditions de vie dans les usines sont exécrables. L’insalubrité des usines et les maladies respiratoires causées par les débris de coton saturant l’air sont monnaie courante. Les enfants sont régulièrement battus dès la moindre faute. Par la suite le travail des enfants va être règlementé, de 8 ans jusqu’en 1870, l’âge minimal passe à 12 ans en 1901.

A la fin du 17-ème siècle, l’indépendance des Etats-Unis joue un rôle capital dans le développement de l’industrie du coton. En s’inspirant des méthodes et des machines utilisées en Europe, la première usine de coton est construite. Pour répondre aux nombreuses demandes de coton, les colons américains décidèrent d’implanter des champs de coton au sud du pays, là où les conditions climatiques sont les plus propices au développement et à la culture du coton.

Pour le bon fonctionnement de ces champs, il faut de la main d’œuvre. Effectivement, la « cotton gin » égreneuse mise au point en 1790 pour séparer mécaniquement les graines de coton, nécessite un besoin important en humain. Pour répondre à ce besoin, les colons tentèrent d’enrôler les indigènes mais ces derniers prenaient facilement la fuite à travers un pays dont ils connaissaient chaque recoin ou mourraient victimes des maladies transmises par les Européens. La question des Blancs miséreux capturés sur le vieux continent fut explorée mais ils se fondaient aisément dans la foule et avaient des protections gouvernementales importantes. Le choix des colons se tourna alors sur les Africains car ils étaient physiquement plus résistants que les Indiens, repérables par leur couleur de peau, ils étaient également peu susceptibles de recourir à la fuite à travers un territoire inconnu et dépourvu de protections gouvernementales.

Les premiers esclaves d’Afriques arrivèrent au milieu du 17-ème siècle dans l’état de Virginie. Cette arrivée d’esclave était le fruit du commerce triangulaire : d’Europe en Afrique, d’Afrique en Amérique, avant de retourner en Europe. Pour les Africains, la traversée de l’Atlantique d’Est en Ouest, d’une durée variant de six à dix semaines, était une descente en enfer. Durant la traversée, certains esclaves préféraient la noyade à la captivité, d’autres sombraient dans la démence ou entamaient une grève de la faim que les négriers brisèrent en les forçant à manger quitte à leur briser les dents. Les maladies tels que la variole, la dysenterie ou le scorbut faisaient des ravages à cause des conditions d’entassement et de saleté où l’on maintenait les esclaves. Ceux qui avaient survécus à ce périple allait subir une autre humiliation : la vente aux enchères. En effet, les esclaves, mis à nus, recevaient des examens physiques humiliants afin d’être vendus aux propriétaires des plantations les plus offrants. La plupart des esclaves étaient séparés de leur famille .

Par crainte d’arrivée de plus en plus nombreuses d’esclaves noirs (70000 en 1790 puis 2 millions en 1830) dans les colonies comme en Caroline du Sud où en 1732 la population était composée de 32 000 Noirs et 14 000 Blanc…. Les colonies élaborent le premier Code des esclaves inspiré des règles en vigueur dans les Caraïbes. Les règles en vigueur étaient très strictes et si les esclaves ne les respectaient pas, ils étaient sujets à recevoir des sanctions comme le fouet, la mutilation et même la pendaison. Avec ce code, la docilité des esclaves est obtenue et la peur est installée…

Quelles étaient les conditions de vie des esclaves dans les plantations ?

La majorité des Blancs du sud ne possédaient pas d’esclave mais parmi les planteurs, près de 90 % avaient au moins 20 esclaves. Dans les grandes plantations, les propriétaires peuvent posséder jusqu’à 400 esclaves. La vie des esclaves était rythmée selon la volonté de leurs maitres, les esclaves étaient considérés comme des objets propriété au même titre que les meubles ou le bétail.

Les conditions de vie étaient désastreuses, les esclaves dormaient dans des cases sans plancher ni de fenêtres, et dormaient à même le sol. Chaque semaine, ils recevaient une ration de nourriture suffisante mais très peu variée. Durant le temps de travail, les esclaves étaient dirigés par des contremaitres qui n’hésitaient pas à perpétrer de terribles punitions corporelles telles que des marques au fer rouge, des mutilations, des coups de fouet et même des mises à mort. Le fouet était aussi fréquemment utilisé par les contremaitres, non pas pour punir, mais pour stimuler l’ardeur au travail. Les esclaves noirs ne pouvaient pas se réunir, quitter la plantation ou passer un contrat sans l’accord de leur maitre. De plus, il était interdit de leur apprendre à lire ou encore de les affranchir. Si les esclaves tentaient de fuir, une milice privée armée de chien dressés pour l’attaque, se chargeaient de les ramener non sans quelques tortures…

Credit : NY Public Library, digital collections 1

Il était fréquent que les femmes subissent des violences sexuelles de la part des contrebandiers ou des maitres. La notion de viol n’existait pas s’agissant des esclaves. Les enfants qui résultaient de ces violences se retrouvaient esclaves comme leur mère.

Dans les champs, les esclaves travaillent de la levée du jour jusqu’à ce qu’on ne puisse plus voir le coton. Les esclaves disposaient d’une pause d’une demi-heure dans la journée seulement. Tous les travaux étaient extrêmement physiques et durs. Durant la cueillette, il n’était pas rare de voir les mains des esclaves finir en sang. Souvent les femmes travaillaient dans les champs avec les hommes et rentraient la nuit pour soigner le bétail. Après le diner, les esclaves devaient filer du coton et fabriquer des vêtements.

Jusqu’au milieu du 19ème siècle, le Sud des Etats-Unis devient l’unique fournisseur des filatures du Nord et le premier fournisseur de la Grande-Bretagne. Les Américains produisent alors 80 % de la production mondiale de coton, estimée à 850 milles tonnes. Les seigneurs du Nord étant « anti-esclavage » par conviction pensent que l’esclavage qui sévit au sud est dû à cette production de coton en grande quantité. Cette tension aboutira à la guerre de sécession entre les partisans du Sud « confédérées » et les partisans du Nord « Union ».

Credit : Archives/Kurz & Allison/Art Publishers 1

Cette guerre a mené à une refonte totale du système de production du coton aux Etats-Unis et provoque une grave crise du coton : 250 000 travailleurs britanniques se retrouvent sans activité. Après la guerre de Sécession, les usines se multiplient au Sud au détriment de celle du Nord. L’’abolition de l’esclavage est proclamée en 1863, mais il reste encore des esclaves travaillant dans les champs même si leur nombre diminue d’année en année.

Face à cette crise aux Etats-Unis, l’Europe cherche des solutions de substitution. L’Inde et l’Égypte reviennent alors sur le devant de la scène et fournissent massivement du coton aux occidentaux. La grande puissance britannique a colonisé l’Inde depuis près d’un siècle et profite de ses richesses comme les épices, l’opium, et le coton. De nombreux tisserands indépendants fabriquent des cotonnades pour les vendre en Asie et en Europe. Mais la Grande-Bretagne, souhaitant s’emparer exclusivement de ce commerce, va assujettir ces tisserands pour fabriquer des Indiennes. Or, la qualité de ces indiennes surpasse celle produites en Grande-Bretagne, les autorités anglaises décidèrent d’importer de la fibre égrenée, forçant les tisserands à retourner travailler dans les champs : leur art se perdirent.

L’Inde se transforme en une colonie agricole, produisant uniquement des cultures exportables au détriment des cultures vivrières. Le système mis en place par le colonisateur sans cultures vivrières rend les paysans extrêmement pauvres, ils ne peuvent plus payer leurs dettes, la misère s’accroit provoquant des famines et des milliers de morts. Le 19ème siècle est le siècle du grand boom du coton, la révolution industrielle provoque une avancée majeure pour le coton, il s’arrache dans les quatre coins de l’Europe et la demande explose. Mais l’exploitation du coton engendre des dérives sociales tragiques, l’esclavage est de vigueur pour assurer le bon fonctionnement de ces champs. L’Europe se sied guère du droit humain et profite de toutes les civilisations pour s’assouvir ces besoins.

Mais la société évolue, l’esclavage est aboli dans certaines régions du globe, des révoltes ont lieu un peu partout pour lutter contre l’omniprésence de l’Europe. Comment l’industrie du coton va-t-elle évoluer ? C’est ce dont nous allons parler dans le prochain volet !

 

Article rédigé par Simon PERE

Par Louis-Marie VAUTIER
Filières

Vous souhaitez mettre en place une démarche RSE
au sein de votre entreprise ?
Vous souhaitez créer des produits éco conçus et certifiés ?

GF
Good Fabric - Good Fashion - Good Thinking - Good People
  • DIAGNOSTIC RSE
  • STRATEGIE & ACCOMPAGNEMENT RSE
  • FORMATION RSE
  • COMMUNICATION RSE
  • ECO DESIGN & ECO DEVELOPPEMENT
  • FILIERES ET USINES CERTIFIEES
  • PRODUITS CERTIFIES

INSCRIPTION GREEN LETTER

Ne manquez plus une seule de nos actualités !
Abonnez-vous à notre Green letter.

GOOD FABRIC

Good Fabric est à la fois éco designer, fabricant de collections et accessoires textiles éthiques et accompagnateur des entreprises dans leur stratégie RSE et la mutation de leur business model.

© 2019 – Good Fabric

Notre site Internet et nos partenaires utilisons différentes technologies, telle que l'utilisation de cookies, afin d'optimiser votre expérience de navigation sur notre site Internet, analyser le trafic, vous fournir une expérience en lien avec les réseaux sociaux ...
Nous vous remercions de cliquer sur le bouton J'accepte sur la droite afin de nous donner votre autorisation pour utiliser ces technologies.
En savoir plus

Pour suivre notre quotidien et devenir un Jedi de la RSE et de l'éco-design

Inscrivez-vous gratuitement à notre newsletter

Merci pour votre inscription !